El Paso Agua Negra

(du 21/03 au 22/03/23)

Nous quittons la petite ville de Vicuña (600 m d’altitude) et traversons la vallée d’Elqui en laissant derrière nous son Pisco, ses immenses observatoires et les ondes apparemment exceptionnelles que ce territoire semble offrir au vue des activités ésotériques qui y sont pratiquées.
Direction : el Paso Agua Negra, une passe qui va nous permettre de traverser la Cordillère des Andes pour retrouver le territoire argentin.
250 km nous attendent entre Vicuña et Las Flores, la frontière de l’Argentine.
La passe se situe à 4.780 m d’altitude, soit 4.200 m plus haut que Vicuña. Une grande première pour nous à cette altitude.
Nous passons la nuit au bord d’une rivière à une vingtaine de km de la ville car nous voulons profiter de la journée lumineuse du lendemain pour faire la traversée et vivre paisiblement cette première expérience à près de 5.000 m d’altitude.

Au petit matin, une tasse de café encore à la main, nous recevons la visite d’une voyageuse à vélo qui se prépare à traverser el Paso Agua Negra en tirant une remorque d’au moins 35 kg derrière elle, en plus de ses sacoches vélos.

 

Un tout petit bout de femme, âgée de 67 ans, qui compte gravir 4.200 m d’altitude, 230 km de piste à la force de ses mollets, là où l’oxygène se raréfie fortement…
Je regarde JP, médusée et je crois voir la tête du génie dans Aladin quand sa mâchoire inférieure se décroche brutalement vers le bas.
Hallucinant !
– « Et en combien de jours, ma p’tite dame ? » lui ai-je demandé.
-« 10-12 jours, j’espère, sous tente. J’essayerai de faire du stop si des Pick-up passent par là… ».
Sur ce coup-là, ses chances sont plutôt faibles car ce n’est pas une passe très fréquentée, surtout en cette période de l’année. Nous avons croisé la route en tout et pour tout de 4 voitures et d’un petit groupe de motards.

Tandis que nous lui offrons un café et qu’elle nous raconte sa vie et ses expériences antérieures (ex DAN ceinture noir de Judo en France qui a réussi à battre à une reprise Ingrid Bergmans), mon cerveau ne cesse de clignoter rouge :  cette personne se met en danger, elle prend des risques considérables en s’aventurant seule, chargée comme elle est. On ne peut décemment pas la laisser seule sur la route, même si elle nous prétend qu’un tel exploit n’est pas le premier…
Mais, nous ne voulons surtout pas la contrarier. Nous lui proposons gentiment de l’emmener au moins jusqu’à la frontière chilienne.
A notre grand étonnement, elle accepte avec un réel soulagement, je le sens bien.
Aussi tôt dit, aussitôt fait : nous embarquons son vélo, sa remorque et ses sacs à l’intérieur du camion, en protégeant bien tout des chocs éventuels.

 

 

C’est ainsi que nous sommes finalement partis à trois pour une sacrée grimpette dont nous allons nous souvenir longtemps !
La piste est vraiment de très bonne qualité.

 

Arrivés à la frontière chilienne, les choses se compliquent pour sortir du pays… Nos passeports sont en règle mais le fameux TIP (document d’importation temporaire du véhicule dans le pays) que nous devons donner à la douane pour pouvoir sortir du Chili n’est pas dans nos papiers. 😩
En plus, les deux agentes féminines en poste ne sont pas du tout commodes. Elles nous accusent d’être entrés de façon illicite avec le véhicule au Chili. Je peux vous assurer que c’est carrément impossible. Tout est barricadé, et le laisser-passer n’est donné que si tout est en règle.
Au contrôle, nos passeports sont bien tamponnés de notre date d’entrée au Chili. Mais, un cachet d’entrée au Chili pour le véhicule se trouve malheureusement sur un document argentin et non sur un document chilien réglementaire.

Les deux pittbulls au guichet ne comptent pas nous lâcher. Je le sens bien. Elles ont trouvé un os à ronger. Il leur faut le papier réglementaire !

Quant à la frontière précédente, elle est à plus de 2.000 km au sud…😩

Surtout, Georgy, garde ton calme !

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Nous essayons de reconstituer le précédent passage en douane. Nous nous souvenons qu’il fut épique de par la fouille approfondie du véhicule par deux douaniers durant une heure.
En repassant le film à rebours, nous nous rendons compte que le douanier précédent a omis de nous remettre notre TIP réglementaire.

Tandis que nous réfléchissons à une solution, Catherine, notre cycliste se fait enquiquiner à son tour par une des deux pittbulls car elle n’a pas de facture pour son vélo. C’est sûr, c’est elle qui l’a fabriqué !
Et, depuis quand faut il un papier pour un vélo à la frontière ??? Première fois depuis des années qu’elle voyage à vélo.

Garde ton calme, Georgy, ne lui met surtout pas un mot de travers, cela n’arrangera pas ton affaire !

Je prends le temps de ré-expliquer calmement en espagnol aux deux agentes comment s’est passé le précédent passage de frontière. Mais, rien n’y fait.
C’est alors qu’un « Zorro » chilien est arrivé, sans se presser … : un gentil douanier masculin, apparemment leur supérieur.
Il est venu voir quel était cette animation au guichet de ses employées.
Après quelques minutes, il a pris nos documents, est parti téléphoner et une bonne vingtaine de minutes plus tard, il nous a remis notre sésame pour sortir du Chili. 🥵
Je lui aurais bien sauté au cou mais je doute qu’il ait vraiment assuré.😂

Quant à notre cycliste, on a expliqué au Pittbull qu’on l’emmenait avec nous pour toute la traversée de la passe et ils l’ont finalement laissée passer aussi. Je pense qu’ils craignaient qu’elle effectue la traversée seule…

Ce fut une expérience un peu stressante, je l’avoue. Mais, le principal est d’en tirer une leçon : toujours TOUT contrôler quand on vous donne des papiers : numéro de plaque, numéro de châssis, orthographe du nom et prénom, papier réglementaire, etc…

Allez, on l’a obtenu finalement, notre sésame ! Maintenant, en route pour l’altitude ! Un no man’s land d’une centaine de km entre les deux frontières.

Les couleurs qui s’offrent progressivement à nous sont incroyables, époustouflantes, de toute beauté !
La cordillère des Andes n’a nulle part son pareil. Plus on grimpe, plus c’est soufflant, au propre comme au figuré.

 

Quelques rares chiliens vivent là au milieu de nulle part avec leur troupeau de chèvres jusqu’à l’arrivée des premiers flocons. Ensuite, ils redescendent dans la vallée.
Au loin, nous apercevons les premiers sommets encore enneigés ainsi que deux petits glaciers.
Nous venons de passer les 3.300 m d’altitude. Plus que 1.500 m à gravir !

 

 

 

 

 

 

 

Nous laissons derrière nous un nuage de poussière, comme partout sur les pistes.

 

Nous voilà arrivés au sommet de la passe : 4.780 m !
A peine sortis du véhicule, la tête nous tourne légèrement. Nous réalisons très vite que la règle des lieux est celle du moindre effort. Heureusement, aucun maux de tête ni de signes de mal être.
Nous y demeurons un bon quart d’heure, le temps de prendre quelques photos et de se dégourdir un peu les jambes.

 

Un projet de réalisation d’un tunnel entre l’Argentine et le Chili est en cours.
Pour quand est-ce prévu, nous ne le savons pas mais une chose est certaine, on est super heureux d’avoir traversé cette passe incroyable avant l’implantation du dit tunnel !
Avis aux voyageurs, ne trainez pas !

 

 

La descente en lacets s’annonce. Elle est plus impressionnante vue d’en haut que réellement compliquée. Avec nos 8 mètres de long, nous parvenons à prendre tous les tournants en une seule manoeuvre.
Quant au moteur, le manque d’oxygène ne l’a absolument pas perturbé. Il faut dire que nous avions bien pris le temps de nettoyer le filtre à air avant de monter.

 

 

 

Arrivés à Las Flores, la frontière de l’Argentine, nous déposons Catherine et son équipement et lui souhaitons bonne route.
Elle descend vers le sud et le froid (mon dieu, quelle idée), nous montons vers le nord et gardons le beau temps.

Côté argentin, les douaniers n’ont même pas pris le temps de nous contrôler : la douanière partait bientôt en voyage de noces en Europe et son unique intérêt était de savoir quels lieux visiter en Belgique entre Bruxelles, Gand et Bruges et quel quartier éviter dans Paris.
Cela nous a beaucoup amusés. On a reçu notre TIP d’entrée en Argentine les doigts dans le nez et nous sommes partis vers notre point de bivouac à une trentaine de km de là, à la Dique Cuesta del Viento.

 

Notre prochaine étape sera le Parc National et Provincial Ischigualasto (la vallée de la lune) et le PN Talampaya en traversant préalablement la Quebrada de Jáchal.

Le Dieu Râ ne nous quitte pas d’une semelle. Nous avons une chance extraordinaire.
Sur un peu plus de 6 mois, à peine 6-7 jours de pluie, principalement côté chilien.

Il est l’heure de vous saluer !
Après toutes les émotions d’une journée absolument magnifique et inattendue, nous méritons le repos du juste.

😴

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Moens Marcel
Moens Marcel
1 année il y a

Bravo pour le coup de main à Catherine et merde pour l’administration quand elle est conne! Belle grimpette et belle descente! A bientôt!

Gillet
Gillet
1 année il y a

Paysages extraordinaires…. Vous en aurez des choses à nous raconter… À très bientôt les amis

Annie et Emile
Annie et Emile
1 année il y a

Que d’émotions ! Bravoo Caroline

Van der Elst Paul
Van der Elst Paul
1 année il y a

Quelle superbe rencontre et quelle aventure stressante. Le paysage était vraiment épostoufflant. Bravo pour votre nouveau défi quotidien

Laurence
Laurence
1 année il y a

Mais quelle aventure pleine de sensations visuelles, gustatives et nerveuses ! C’est toujours un réel plaisir de recevoir ta prose Caroline et de pouvoir admirer les magnifiques photos. On voyage un peu avec vous.

Gerard eve
Gerard eve
1 année il y a

Quels rebondissements! J’imagine le stress… et cette femme a eu vmt de la chance de tombé sur vs

rul
rul
11 mois il y a

quelle affaire ! Que de souvenirs vous amassez !

Faudra vivre 100 ans pour raconter tout ça !

Bisois

Fiona
Fiona
11 mois il y a

Extraordinarily Awesome !

ALCOL
ALCOL
11 mois il y a

Hello les amis,
De retour d’Hendaye point ultime (côté français) de la voie de Tours d’un des chemins de Saint Jacques de Compostelle, nous vous disons encore bravo pour ce passage très délicat à tout point de vue.
Biz à partager
Colette et Alain

anne-caroline
anne-caroline
10 mois il y a

Il y avait longtemps que je n’avais pas eu le temps de prendre un grand bol d’air avec vous… waouh j’avais presque oublier que c’était si beau, si bon !
Super l’idée de la vidéo !

Anne-Caroline
Anne-Caroline
10 mois il y a

Et au bout d’un mois, vous avez des nouvelles de Catherine, la folle cycliste ?
Que ce passage est magnifique… à faire tourner les têtes !